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Une brève histoire de l'avenir des Transports - Les transports du futur

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17/05/2013

Une brève histoire de l'avenir des Transports

N'ayant pas su s'intégrer dans le numérique nomade porté par la multitude, certains, comme DELL ou NOKIA s'engagent dans des mutations profondes de leur modèle d'affaires. Pour cela, ils sont prêts à déplaire aux marchés et à certains clients trop axés sur le court terme, mais se fixent des objectifs à long terme. D'autres, comme Kodak, avaient voulu conserver leur rente le plus tard possible et ont disparu.

Explorons les différents intervenants du monde des transports pour identifier les forces et les faiblesses de chacun et établir le portrait robot d'un potentiel leader des mobilités dans un monde numérique. Avant tout, ce leader devra être totalement en empathie avec les usagers, avec les collectivités, pour comprendre, avec tous ces sens, les expériences vécues. Ce préalable devient indispensable pour être capable de séduire la multitude, lui proposer des produits et des services sans pollution, sans dommage, sans perdant, l’amener à communiquer de plus en plus de données (jugées aujourd’hui privées), puis pour certains, réussir à les impliquer pour co-concevoir les prochains services. Il faudra pour cela explorer vos vraies richesses.

Tous les acteurs du transport ont une histoire singulière, des temporalités spécifiques, des modèles d'affaires et des capacités d'innovations qui leur sont propres. Il faut les connaître en détail pour mieux les dépasser. Les gagnants de demain seront ceux qui auront évolué, se seront remis en question, quitté leur position stable, pris des risques, échoué, questionné leur organisation, questionné leur modèle d'affaires, questionné leur capacité à connaître les besoins de la multitude. Dans tous les cas, il est nécessaire dès aujourd'hui de former un équipage pour explorer votre futur.

Les opérateurs de transports publics (voir MétaNote N°15) gèrent quasiment la totalité des modes, sont en contact avec les usagers sur tous les continents. Engagés dans des partenariats publics-privés sur plusieurs années, ils intègrent progressivement de plus en plus de numérique pour améliorer les services aux usagers. Ce sont les partenaires principaux des collectivités. Leurs capacités d'innovations sont importantes mais les champs de contraintes s'appliquant sur leurs processus de décision sont tels que les changements réels sont généralement faibles. Ne pouvant s'allier avec d'autres opérateurs, ils ne peuvent aujourd'hui optimiser suffisamment les interfaces, les interstices, donc la multimodalité, et l'expérience vécue. De plus, les opérateurs proposent une offre soit sous-dimensionnée en période de pointe du point de vue de l'usager, soit sur-dimensionnée du point de vue du contribuable. Cette équation impossible à optimiser ne peut être résolue qu'en augmentant le périmètre du système et les paramètres à considérer. Se pose alors la question de la capacité des opérateurs à collaborer avec d'autres, à séduire l'usager et l’automobiliste pour l'engager dans une démarche de co-création.

Les fournisseurs de service de mobilité (Vélo libre service, TàD, autopartage, …) soutenus par l'autorité organisatrice complètent l'offre de transports publics traditionnelle mise en œuvre par les opérateurs. Ces services apportent de nouveaux usages automobiles et permettent aux citoyens d'expérimenter facilement d'autres mobilités complémentaires aux transports collectifs. Comme ces derniers, la rentabilité des capitaux employés d’un point de vue strictement économique ou environnemental est très difficile à estimer.

Les opérateurs de modes collectifs privés, comme le train ou l'avion, opèrent quant à eux un mode principal puis cherchent à se diversifier à ajoutant les modes complémentaires à leur palette de compétences pour relier intégralement origine/destination finale. Le numérique permet de simplifier l'accès et la sortie du mode principal, de le connecter à l'entrée et la sortie, d'améliorer l'expérience vécue. L'arrivée d'acteurs low-cost a bouleversé leur chaîne de valeur dans leur cœur de métier, et l'arrivée de services de mobilité pair à pair conduit également à une concurrence.

Les opérateurs de modes individuels, comme les taxis ou les motos taxis, sont en concurrence direct avec la multitude et les « nouvelles » capacités d'innovations données par le numérique. La mise en relation entre l'offre et la demande, permettant en plus de maximiser l'investissement individuel, placent le citoyen comme un potentiel opérateur des mobilités de ses « réseaux ». Ces acteurs économiques seront soumis à une concurrence permanente des citoyens reliés, et demain des robots.

Les autorités organisatrices de transports représentent les besoins des citoyens à la fois usagers des transports et contribuables. Elles définissent les objectifs et une partie des moyens utilisés par le ou les opérateurs pour réaliser le service. D'autres services gèrent également les infrastructures routières, les parkings, les informations fournies aux voyageurs ou encore les politiques tarifaires, les éventuelles contraintes appliquées aux automobiles (péage urbain, restriction d'utilisation, etc...). Mais l'ensemble de ces offres de mobilité n'est pas optimisé en tant que système tant d'un point de vue de l'intermodalité des services mêmes, que du point de vue de la cohérence des contraintes et des récompenses visant à faire changer les comportements. Sans objectifs ambitieux, clairs et partagés à 10 ans, les décisions actuelles permettent avant tout d'atténuer les nuisances.

Les fournisseurs de service de mobilité entre particuliers industrialisent des processus permettant de maximiser l'investissement des particuliers (covoiturage, autopartage P2P) ou de tiers (taxi partagé). Il s'agit d'acteurs totalement nouveaux, dont le cœur de métier est avant tout l'animation d'un collectif d'intérêt, rendu possible par des outils numériques de mise en relation. Ils ont choisi le secteur des transports, mais auraient pu faire quasiment le même métier dans le voyage ou l'immobilier. Ces acteurs pensent donc de façon résolument différente : expérience utilisateur, réseau social, version béta, changement permanent. Ils possèdent un sens inné du marketing auprès de la multitude, et sont en empathie avec leurs réseaux. En conséquence, ces acteurs disposent des principales caractéristiques pour devenir l'acteur central. Plus que le service de mobilité, ils disposent de connaissances inédites sur les usages de leurs réseaux. Ces nouveaux savoirs vont leur permettre d'ici d'avoir « autorité ». Malheureusement, ils sont condamnés à grandir et se faisant, la plupart ne sont pas capables de conserver cette dynamique, cette souplesse, cette proximité avec le citoyen, cette remise en question permanente. D'autant plus que les acteurs historiques n'attendent qu'une chose : les intégrer dans le modèle d'affaires dominant. Nous verrons que la seule solution pour eux est de devenir une plateforme. Nous les appellerons les « relieurs » pour leur capacité à relier les particuliers.

Les constructeurs automobiles (voir MétaNote N°14), mais également de deux roues ou de quadricycles, industrialisent des produits et des services d'une extrême complexité dans des processus mondiaux maîtrisés. 100 ans d'histoire ont permis à cette intelligence collective de délivrer toujours plus pour toujours moins et plus vite. Cette filière industrielle propose un produit pouvant être utilisé par n'importe qui, sur toute la planète. Paradoxalement ces qualités d’adaptation (à toutes les routes, tous les conducteurs) ont conduit les constructeurs à sous estimer l'importance de numériser les routes, et l'importance de réduire les coûts d’investissement et de fonctionnement pour tous les conducteurs.

Les constructeurs d'infrastructures construisent et opèrent à la fois des réseaux permettant le fonctionnement des modes, mais également des interfaces entre les modes (parking, gare, station). Construire de nouvelles infrastructures de transports impose de se questionner sur les évolutions des pratiques en matière de mobilités, de logistiques, ou encore de ressources énergétiques. A l’inverse l’infrastructure conditionnera à son tour elle-aussi les futurs possibles. La résilience, l’adaptabilité et la versatilité du lieu pourraient alors devenir les atouts majeurs de nos prochaines infrastructures. Ces dernières pourraient devenir des facilitatrices de mobilités multi-modales, et de connexion avec les services urbains.

Les opérateurs telecoms et numériques, mettent à disposition de la multitude des outils des reliances, et accèdent eux aussi à des données à forte VA sur les usages. Demain l'internet des objets peut les placer favorablement dans leur capacité à comprendre la complexité, donc à optimiser ces systèmes. Déjà aujourd’hui, ils vendent les traces numériques des citoyens à des collectivités et des opérateurs. Mais ce commerce de données ne sera pas accepté longtemps par la multitude sans «récompenses».

Tous les acteurs historiques s’observent actuellement dans cette mutation, cherchent à adapter leur modèle d’affaire traditionnel. Mais les marges de manœuvre disponibles semblent trop étroites, le nombre de degré de liberté trop faible. En même temps, arrivent depuis quelques années des acteurs mutants.

Les 4 fantastiques

Ces « 4 fantastiques » sont Google, Amazon, Apple et Facebook. Leur capacité d'innovations malgré leur taille bouleverse les codes établis. Ils inventent en même temps les règles, les modèles d'affaires et obligent à innover en droit. Leurs produits/services structurent de plus en plus nos vies quotidiennes. L'internet nomade en tant que nouveau mode de communication planétaire s'est diffusé à une vitesse inédite, leur offrant une audience et une capacité à se diffuser. Les 4 fantastiques considèrent tous la mobilité et le mouvement comme un champ d'innovation majeur. Nous nous concentrerons sur Amazon, Google et Facebook, puis Apple, qui a depuis peu intégré l'automobile avec Siri.

Google est la plateforme mondiale d’une multitude de services et produits, rabattant des flux vers la publicité, « coeur de création monétaire ». Parti d’une application, le moteur de recherche, Google a rapidement muté en plateforme, et il pourrait appliquer exactement les mêmes procédés, les mêmes techniques, les mêmes modèles d’affaires pour arriver dans le champ de la mobilité physique des personnes. Cette fiction s’appelle Google Mobility Service. Elle a déjà commencé à travers les 2 projets phares : Google glass & Cybercar.

Alors que Google transforme très peu de clic en euro, Amazon a structurellement un rendement bien supérieur. Utilisant également la puissance de la multitude appliquée aux commerces des objets, Amazon est la plateforme préférée des américains pour sa qualité de service. Autre business fiction, Amazon se lance dans la distribution de carburants : Amazon Energy Service.

Facebook était au départ un réseau social. Mais il s’est désormais transformé, lui aussi, en plateforme, dont le réseau social n’est plus qu’un « service », une application. Facebook serait devenu comme Google, une plateforme publicitaire mobile. Demain paradoxalement, ce seront les plateformes qui décideront de sauver, ou pas, une industrie des objets comme Nokia. Et une autre application de Facebook pourrait être demain la mobilité. Le rachat potentiel de Waze le démontre. Connaître les positions, les mouvements est essentiel pour adresser un message contextualisé à une requête venant de l’usager ou pour proposer un produit/service en « push ». Le combat des cartes Google, Apple en est l’emblême.

D’une toute autre façon, Apple montre que l’intégration verticale « intégrale » possède d’indéniables atouts. Elle permet notamment la maîtrise du design simultané des objets, des logiciels, des interfaces et donc des expériences. Apple est donc d’une certaine façon une plateforme d’expériences, les applications étant ici ces produits. Un constructeur automobile pourrait devenir l’Apple des mobilités en créant une nouvelle structure indépendante de la production des objets historiques.

Une brève histoire de l’avenir des transports

Pour cela, le design serviciel des mobilités imposera de revoir totalement l’objet véhicule, ses interfaces, ses représentations sociales, ses marges bénéficiaires, et donc sa valeur. Plus difficile encore, l’objet véhicule devra être considéré comme un accessoire, un moyen et non une fin ; la valeur devra être transférée ailleurs et nous y reviendrons. Le constructeur devenu provider de mobilité aura également réussi à attirer à lui les meilleurs « relieurs », à leur permettre d’innover en permanence sans leur imposer une lourdeur industrielle. Les utilisateurs seront également séduits, volontaires pour proposer des évolutions, pour certains outillés pour créer, et pour les meilleurs, inclus au plus près des structures de décision. Ce constructeur aura augmenté son autorité par de nouvelles connaissances sur les usages, les besoins réels, s’adaptera à tous les territoires par sa reliance à la multitude, et donc augmentera son empathie. Aujourd’hui pour les différents constructeurs (VW greenwheels, Daimler Mobility service, Peugeot Mu, Citroen Multicity, ou encore Toyota ou BMW…) les services de mobilité restent un moyen de vendre des voitures, ils restent dans le modèle d’affaires historique. A ce jour, aucun constructeur n’est devenu une plateforme au sens des 4 fantastiques.

L’intégrateur vertical ne pourrait, pour le moment, pas être un industriel de l’énergie, trop centrés sur leur rente. Certains territoires, collectivités, lancés dans une compétition mondiale des meilleures «smart cities», pourraient devenir d’une certaine façon des intégrateurs verticaux, des plateformes territorialisées. Agrégeant l’offre multiple des services de mobilités, l’autorité organisatrice portée par les usagers, deviendra un designer d’expériences de mobilité multimodales permettant également d’optimiser les investissements publics en matière d’infrastructures et de transports collectifs traditionnels. Déjà des collectivités ont compris aujourd’hui que les services de mobilités des «relieurs» sont un moyen de réduire les dépenses de fonctionnement des transports publics. Certaines collectivités iront même jusqu’à faire concevoir de nouveaux véhicules adaptés à leur besoin d’UX. Cette offre de mobilité sera également combinée avec de nouvelles organisations d’entreprises sur le territoire permettant de penser également l’immobilité, les temporalités, les téléactivités, là aussi pour maximiser l’usage des investissements. De nouveaux métiers pourraient naître aux interfaces de ces autorités organisatrices des mobilités et des opérateurs de mobilités, pour répliquer cette démarche. Demain, il est probable que les meilleurs territoires deviennent les ambassadeurs de cette nouvelle filière industrielle, et se présentent comme une plateforme servicielle auprès des citoyens.

Certains opérateurs de transports publics seraient également bien placés pour devenir des plateformes mondiales. Ayant appris sur quelques territoires leaders, Voolia (exVeolia googleisé) aura industrialisé des outils numériques et des processus permettant de garantir au territoire hôte : des expériences de mobilité HQE, des réductions d’externalités. Pour la collectivité, Voolia sera devenu un simplificateur, un réducteur de consommation de carburant fossile, un fournisseur de mobilités. Mais pour cela, elle devra industrialiser des plateformes d’une totale transparence. Son existence même sera liée à la réduction des externalités, des consommations de matières premières et d’énergies, à l’efficacité. Plus les conditions extérieures seront contraintes et sévères, plus les mécanismes mis en œuvre seront pertinents et plus ils se développeront. L’opérateur de transport aura également noué des partenariats avec des territoires parfaitement formés et conscients du potentiel et de la nécessité de s’engager dans des solutions basées sur l’intelligence collective globale. Des innovations sont nécessaires pour créer dans la diversité des territoires des structures apprenantes capables d’instaurer un niveau de confiance suffisant pour identifier les pionniers, puis que ces derniers comprennent et acceptent d’utiliser des outils numériques intrusifs parce qu’ils seront convaincus qu’ils ont plus beaucoup plus à gagner qu’à perdre.

Devenir la première plateforme des mobilités

Cette transformation d’une application de départ (moteur de recherche, vente de livre, réseau social et ordinateur) vers une plateforme est détaillée et expliquée dans l’âge de la Multitude. « Une plateforme bat toujours une application ».

Si, pour devenir plus séduisante une des 4 plateformes mondiales doit proposer des applications de mobilité, alors elle le fera. Elles ont toutes les 4 les capacités techniques et financières pour s’engager dans ces développements. Quelle sera la première des 4 à avoir besoin d’offrir des applications de mobilité ? et quelle sera la chaîne de valeur résultante et la position des fabricants de véhicule ?

Si ces 4 plateformes mondiales existent, sont ce qu’elles sont, c’est qu’elles possèdent toutes des qualités spécifiques inédites. Certains annoncent déjà que ces plateformes pourraient devenir celles de tous les objets connectés. La principale qualité est la capacité de séduction de la multitude qui accepte, non seulement, de passer du temps sur la plateforme, d’acheter à travers elle des expériences, mais surtout de travailler gratuitement en lui donnant toutes ses traces numériques.

Tant que ce «consentement au don de données» existe, que les expériences vécues sont jugées «supérieures», la plateforme continue d’attirer les services, qui continuent d’attirer la multitude, et qui permet à la plateforme de s’améliorer pour être plus séduisante. Et ce «consentement au don de données» est basé sur le sentiment réel ou perçu que la plateforme vous donnera plus, que le risque au don est inférieur aux bénéfices apportés par la plateforme. Mais ce basculement vers l’avant pourrait être un leurre. Quand les plateformes seront devenues (ne le sont-elles pas déjà) incontournables, est-ce toujours un consentement ? Et si une nouvelle forme de l’ordre marchand n’inventait pas là, tout simplement, de nouveaux modèles d’affaires ?

Sommes-nous capables de réduire ces risques pour ne garder que les formidables opportunités offertes par ces plateformes ? Quelle serait, pour le contexte français, la meilleure plateforme ?

En effet, compte tenu de la puissance des plateformes pour optimiser nos systèmes complexes (ville, énergie, transport, alimentation…), il est nécessaire de progresser sur la répartition des bénéfices entre la plateforme et la multitude. Le consentement au don de données doit être exposé à la multitude sur la base de contrat plus clair portant sur la gestion, le traitement et l’utilisation des traces numériques. De nouvelles solutions de fiscalité sont dès lors applicables, là aussi pour des bénéfices collectifs. Ces bénéfices individuels et collectifs devront être quantifiés, suivis et analysés. Dans chaque plateforme, plusieurs monnaies seront sans doute mises en œuvre pour simplifier, fédérer les collectifs, augmenter la reliance : des monnaies par métier, par communauté d’intérêt, par territoire, …

La future plateforme viendra donc soit d’un des 4 fantastiques, soit d’une collectivité de rang mondial devenue Opérateur Territorial d’Expériences, soit d’un relieur devenu Réseau Social des Mobilités, soit d’un opérateur de transports publics devenu Fournisseur d’économie positive, soit d’un des premiers constructeurs mondiaux devenu également Fournisseur de Mobilité.

Enfin, pour devenir une plateforme, tous les acteurs devront questionner fortement leur propre organisation, leur processus de décision, leur capacité à utiliser tout le potentiel créatif de leurs équipes. Et pour cela, se former à d’autres formes d’intelligence collective, pour ne concevoir que des produits, services et expériences sans perdant, sans pollution, ni dommage.

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